Cochon tirelire en aquarelle

Pourquoi les tirelires sont en forme de cochon ?

Qui n’a jamais eu une tirelire cochon ?
Rose bonbon, dodue, fendue d’une rainure sur le dos, la tirelire en forme de cochon est un objet aussi familier qu’intrigant. Elle trône dans les chambres d’enfants, orne les vitrines des banques et revient en force dans les boutiques vintage. Mais pourquoi diable cet animal ferme-t-il la marche de nos économies ?

Ce petit cochon cache bien son jeu : sous son air naïf se dissimule une histoire multicouche mêlant jeux de mots médiévaux, traditions rurales et croyances transcontinentales. D’un pot d’argile anonyme aux pièces avalées par des cochons vivants, le parcours de cette mascotte de l’épargne est aussi farfelu que fascinant.

Dans ce billet, on décortique tout : des racines linguistiques anglaises à l’imaginaire paysan européen, en passant par les antiques tirelires javanaises. Accrochez-vous, ça va grogner… mais avec classe.

1. Une histoire de terre et de mots : l’origine anglaise

Au commencement, il y avait… de la boue. Ou plutôt, de l’argile bon marché, utilisée dans l’Angleterre médiévale pour fabriquer des pots, des jarres et — surprise — des récipients à pièces. Cette argile s’appelait pygg. Rien à voir avec un cochon, du moins pas encore.

Les Anglais stockaient donc leur monnaie dans des pygg jars, littéralement des « pots en pygg ». Mais voilà : quelques siècles plus tard, la langue a évolué, les accents ont glissé, et pygg a commencé à se prononcer comme pig — qui signifie… cochon.

Et c’est là que l’histoire devient savoureuse : des potiers du XVIIIe siècle, flairant l’aubaine ou simplement joueurs, ont décidé de fabriquer des tirelires en forme de cochon. Un clin d’œil phonétique devenu phénomène culturel. Quand le mot forge l’objet, et que le cochon devient, malgré lui, le banquier attitré de l’enfance.

Pourquoi les tirelires sont en forme de cochon ?

 

2. Le cochon, symbole d’épargne et de prospérité

Avant de finir en céramique rose sur une étagère, le cochon fut le véritable coffre-fort des campagnes anglaises. Dans les foyers ruraux du XVIIIe siècle, posséder un porc, c’était comme avoir un livret A bien garni : on le nourrissait patiemment, puis on le revendait pour sa viande, sa graisse, son cuir… Un investissement avec rendement différé, en somme.

D’où cette image tenace du cochon comme “coffre sur pattes”. Il grossit, il dort, il attend — et un jour, il rapporte. L’épargne, version bacon.

Et cette symbolique dépasse les frontières britanniques. En Allemagne, une expression populaire dit : “Schwein gehabt” — littéralement, “tu as eu un cochon”, c’est-à-dire “tu as eu de la chance”. Là aussi, le porc incarne la richesse, la fertilité, la bonne fortune. Bref, un animal totem du portefeuille bien rempli.

Pas étonnant, alors, que l’idée d’en faire une tirelire ait si bien collé. Il ne manquait plus qu’un potier facétieux pour concrétiser la chose…

Diagrame-du-cycle-de-prospérité-du-cochon

 

3. Des racines encore plus anciennes : l’Asie précurseur

Et si le véritable berceau de la tirelire cochon se trouvait bien plus à l’est ? Direction Java, XIVe siècle, sous l’Empire Majapahit. Là-bas, on a retrouvé des tirelires en forme de… sanglier. Oui, un cousin rustique du cochon, trapu, boudeur, mais gardien tout aussi vigilant des pièces de monnaie.

Ces tirelires, souvent en terre cuite, portaient un nom évocateur : « celengan », mot javanais qui signifie à la fois “sanglier” et “épargne”. Un coup du destin linguistique ou une construction intentionnelle ? Difficile à trancher. Ce qui est sûr, c’est que le lien entre cochon et argent y était déjà scellé, bien avant les potiers anglais et leurs jeux de mots phonétiques.

Ainsi, bien avant que les cochons d’Occident n’avalent nos centimes, leurs cousins asiatiques gardaient déjà les trésors des anciens. Comme quoi, l’épargne a toujours eu du groin.

 

4. Tradition, pédagogie et design : la tirelire cochon à travers le temps

Ce qui était à l’origine un simple récipient en terre est devenu, au fil des siècles, un objet chargé de sens, de souvenirs et d’éducation. La tirelire cochon, c’est souvent le tout premier contact qu’un enfant entretient avec l’idée d’épargne. Une pièce après l’autre, il apprend la patience, la valeur de l’attente, le plaisir de voir son “cochon” grossir.

Mais il y a un moment charnière : celui où il faut casser la tirelire. Un geste irréversible, presque cérémonial, qui oblige à réfléchir avant de dépenser. Ce n’est pas un simple retrait au distributeur. C’est un choix. Une pause. Un calcul. La pédagogie du cochon, c’est du concret.

Côté design, si la forme, les matériaux et les couleurs ont évolué — plastique flashy, céramique chic, métal vintage — le cochon, lui, reste. Parce qu’il amuse, qu’il rassure, et qu’il fait sens. Malgré les applis bancaires et les crypto-monnaies, le cochon trône encore sur les étagères. Et il continue de grogner en faveur de l’épargne raisonnée.

 

Conclusion : Une tirelire cochon pour mille raisons

De la glaise médiévale anglaise aux traditions javanaises, en passant par les proverbes allemands et les économies rurales, la tirelire cochon est le fruit d’un improbable cocktail culturel. Une histoire de mots, de symboles, de pratiques économiques… et d’humour potier.

Mais au fond, ce petit animal ventru dit quelque chose de profondément humain : l’envie de garder, d’anticiper, de sécuriser. Il incarne une sagesse populaire transmise de génération en génération, sans discours pompeux ni tableau Excel.

Et si aujourd’hui, à l’heure du “acheter maintenant, payer plus tard”, on reprenait un peu de cette philosophie cochonne ? Épargner lentement, choisir avec soin, savourer le moment où l’on ouvre la panse du cochon.

Peut-être que le secret d’une finance plus saine… tient dans un groin de céramique.

FAQ – Tout savoir sur la tirelire cochon

Pourquoi les tirelires sont-elles souvent en forme de cochon ?

La forme de cochon vient d’un jeu de mots historique : au Moyen Âge en Angleterre, on utilisait une argile appelée « pygg » pour fabriquer des récipients. Avec le temps, « pygg » a été confondu avec « pig » (cochon), d’où l’idée de fabriquer des tirelires en forme de cochon.

Est-ce que toutes les cultures utilisent le cochon comme symbole d’épargne ?

Non. Si le cochon est largement répandu en Europe, notamment en Allemagne et en Angleterre, d’autres cultures utilisent différents symboles. En Asie, par exemple, les premières tirelires javanaises représentaient des sangliers, liés à l’épargne à travers le mot local celengan.

Pourquoi fallait-il casser les tirelires autrefois ?

Les anciennes tirelires n’avaient pas d’ouverture : pour accéder à l’argent, il fallait les briser. Cela incitait à la réflexion et à ne pas dépenser impulsivement — une forme de pédagogie par la frustration constructive.

Le cochon est-il toujours le design préféré aujourd’hui ?

Le cochon reste une icône, mais les designs ont évolué. On trouve désormais des tirelires en forme de robots, de chats porte-bonheur, ou même d’objets abstraits. Toutefois, le cochon garde une place particulière grâce à son héritage culturel et affectif.

Est-ce utile d’avoir une tirelire à l’ère du numérique ?

Absolument. Même à l’heure des comptes en ligne, la tirelire physique reste un excellent outil d’éducation financière, notamment pour les enfants. Elle permet de visualiser concrètement l’acte d’épargner — et ça, aucun écran ne peut le remplacer.

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